01_Structure de gouvernance canadienne et états unienne - CUPUM/ecometropole_laurentienne GitHub Wiki
La structure de gouvernance actuelle du Saint-Laurent repose sur un principe de gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) qui mobilise une vaste diversité d’acteurs. Chapeautée par le Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec (MDDELCC) et Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), cette forme de gestion des ressources s’insère dans une démarche de développement durable et vise à accroître la participation citoyenne. La gestion intégrée du Saint-Laurent (GISL), amorcée en 2011, fait partie de cette démarche. Elle prend en compte la diversité et de la complexité des ressources, des enjeux et des acteurs concernés.
Cette forme de gouvernance émerge de la signature en 1985 de la Charte des Grands Lacs par les provinces du Québec, de l’Ontario et de huit états américains soit, l’Illinois, l’Indiana, le Michigan, le Minnesota, New York, la Pennsylvanie, l’Ohio et le Wisconsin. Elle prend également forme à travers l’adoption d’une première phase, d’une durée de cinq ans, du Plan d’action Saint-Laurent (PASL) en 1988. L’orientation principale de cet effort de collaboration entre les ministères fédéraux et provinciaux était l’acquisition de connaissances quant à l’état du fleuve afin de développer des outils et des stratégies permettant une gestion durable du Saint-Laurent. Soulignons l’établissement des normes en ce qui a trait au rejet des liquides toxiques ainsi que la mise en place de stratégies de réduction et de contrôle des polluants. Cette première phase se caractérise, de plus, par une participation des organismes environnementaux non gouvernementaux dans les procédés décisionnels ainsi que dans la gestion de divers sites protégés en lien avec le fleuve[^1].
On note, dans cette optique, la création de comités des zones d'intervention prioritaire (Comités ZIP) au cours de l’année suivante. Ceux-ci agissent en tant que collaborateurs au plan d’action en proposant des actions prioritaires. Ils sont définis comme des organismes régionaux formés d’usagers du Saint-Laurent à l’intérieur d’un territoire précis. Ils contribuent ainsi à définir des stratégies locales, notamment par l’élaboration d’un Plan d’action et de réhabilitation écologique (PARE). Les douze comités ZIP[^2] de la province sont également regroupés sous l’organisme Stratégies Saint-Laurent, un organisme à but non lucratif créé en 1989 dont la mission est d’assurer la concertation entre les différents comités[^3].
La seconde phase du plan d’action est comprise entre 1993 et 1998. Elle est caractérisée par un renforcement des objectifs fixés précédemment. Désormais désigné sous le nom d’ « Entente Saint-Laurent Vision 2000 », elle comprend diverses stratégies de réduction des rejets liquides, des efforts de restauration ainsi qu’un plan de protection des bélugas. L’un des éléments d’importance de cette phase est l’accroissement de l’implication communautaire. Mentionnons la mise en place du programme d’interactions communautaires permettant de favoriser les projets locaux de sensibilisation, de protection, de restauration ainsi que l’élargissement du rôle des comités ZIP[^4].
La troisième phase du plan soit, de 1998 à 2003, se traduit par une diversification des domaines d’interventions. Dans un effort de protection des milieux naturels, le gouvernement facilite la création des réserves écologiques et de réserves fauniques. La reconnaissance du rôle des riverains définit également cette phase. On y voit la mise en place d’initiatives comme le programme financier « Accès au fleuve » qui permet une réappropriation des rives par les citoyens[^5]. Certaines modifications législatives viennent soutenir les efforts amorcés lors de cette troisième étape, notamment l’Annexe 2001 de la Charte des Grands Lacs et l’adoption de la Politique nationale de l’eau en 2002 qui reconnait le statut d’importance du fleuve.
La période comprise entre 2005 et 2010 voit la réalisation de la quatrième phase de ce plan d’action. Celui-ci porte désormais le nom du « Plan Saint-Laurent pour un développement durable ». On observe principalement la continuité des efforts entamés précédemment en plus d’un perfectionnement des méthodes de suivi de l’écosystème du Saint-Laurent, particulièrement dans un contexte de changement climatique. Notons la signature en 2005 de l’Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent par les gouvernements du Québec et de l’Ontario ainsi que les huit états américains signataires de la charte de 1985. Cette entente met en application une interdiction législative quant aux dérivations hors du bassin et établit des normes communes en ce qui a trait aux prélèvements d’eau à l’intérieur du bassin[^6]. On y voit de plus, au cours de cette phase, une augmentation des efforts de collaborations entre les différents acteurs à travers notamment la tenue en 2009 du forum « Des communautés actives tournées vers le Saint-Laurent[^7] ».
La gestion intégrée de l’eau s’est concrétisée dans le cadre du Plan d’Action Saint-Laurent 2011-2026 soit, la cinquième phase du plan d’action. C’est dans le cadre de cette présente phase que les instances gouvernementales mettent en place l’un des principaux mécanismes de concertation. Il est question ici des Tables de concertation régionales (TCR) qui sont des entités autonomes et permanentes dont les principales missions sont de favoriser une concertation des différents intervenants concernés par les enjeux liés au Saint-Laurent et contribuer à la conception d’un plan de gestion intégrée régional (PGIR)[^8]. Ce plan vise à effectuer un portrait global de la zone concernée, à identifier les principaux enjeux qui la caractérisent ainsi qu’à proposer des interventions spécifiques quant à la restauration, la protection et la mise en valeur du territoire d’étude. Il est possible pour la TCR de déléguer le mandat d’élaboration du PGIR à une tierce identité. Ces mandats sont plus communément délégués à des comités ZIP en raison de leur rôle de premier plan et de leur expertise du milieu.
On retrouve douze tables de concertation à l’échelle de la province. Les territoires d’application de ces dernières sont délimités en fonction de leurs caractéristiques environnementales, de leurs frontières administratives, de leurs travaux de concertations et des critères spécifiques au niveau de l’occupation du territoire.
Figure 7 – Zones de gestion intégrée du Saint-Laurent
Ces territoires d’intervention s’entrecoupent à certains territoires des Organismes de bassins versants (OBV) qui sont des organismes chargés de l’élaboration de plans directeurs de l’eau (PDE) pour chacune des quarante zones de bassins versants établis par le gouvernement québécois. Ce procédé s’insère dans une démarche connexe qui est celle de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant (GIEBV)[^9].
Zones de gestion intégrée de l’eau par bassin versant
Si les structures des tables de concertation sont similaires, il relève de chaque table de déterminer ses règles précises relativement à son fonctionnement et à son organisation. L’un des objectifs de la TCR est de refléter la nature des intérêts et des activités propres à son territoire d’intervention. Il en revient des différents groupes d’acteurs impliqués d’élire les représentants qui siègeront à la table de concertation. On retrouve en général des acteurs issus des secteurs suivants : le secteur municipal, le secteur autochtone, le secteur économique ainsi que le secteur communautaire et environnemental. Ces derniers constituent les membres ayant un droit de vote en ce qui a trait aux activités et aux actions prioritaires de la TCR. On retrouve également à l’intérieur de la table des membres sans droit de vote qui agissent à titre d’observateur et ont un rôle de soutien. Il est question des représentants des comités ZIP, les OBV directement concernés par les interventions de la TCR ainsi que les conseillers gouvernementaux des différents ministères provinciaux et fédéraux impliqués dans la gestion du Saint-Laurent[^10].
Six des tables de concertations régionales ont présentement un statut actif tandis que l’autre moitié demeure en processus de réalisation. Présentons de façon sommaire les différentes TCR existantes à l’échelle du territoire ainsi que leurs axes d’interventions prioritaires.
La première table de concertation est celle du Haut Saint-Laurent et du Grand Montréal. Son territoire s’étend de la frontière américano-ontarienne jusqu’à la municipalité de Lanoraie dans la région de Lanaudière. Il s’agit du territoire le plus populeux de l’ensemble des zones de gestion intégrée du Saint-Laurent. Les activités de celle-ci sont coordonnées par les comités ZIP Jacques-Cartier, Haut Saint-Laurent et des Seigneuries. Les thématiques structurantes sur lesquelles se concentrent les comités de travail sont la santé humaine, les usages économiques, la biodiversité et les questions d’identité[^11].
La seconde TCR est celle du lac Saint-Pierre qui est coordonnée par le comité ZIP du lac Saint-Pierre. Le territoire d’intervention s’étend des municipalités de Sorel-Tracy à celle de Trois-Rivières. Cinq priorités ont été établies par les membres de la table. Il est question de la conservation des milieux humides et hydriques, la cohabitation de l’agriculture et de la faune, l’amélioration de la qualité de l’eau, la navigation commerciale, de plaisance et autochtone durable et finalement la gestion écologique des niveaux d’eau[^12].
Le territoire compris entre Bécancour situé dans la région du Centre-du-Québec et Neuville, une municipalité de la région de la Capitale-Nationale forme la troisième TCR ; celle de l’Estuaire fluvial. Ses activités sont prises en charge par le comité ZIP des Deux Rives[^13]. Les chantiers de travail priorisés par la table sont l’accès et la mise en valeur du fleuve, la qualité de l’eau, la conservation des milieux naturels ainsi que la gestion des rives, du littoral et de la plaine inondable[^14].
La quatrième table de concertation est celle de la Région de Québec dont le mandat est assuré par la Communauté métropolitaine de Québec. Le territoire d’intervention s’étend de Lévis jusqu’au territoire non organisé de Sault-au-Cochon[^15]. Ses actions prioritaires sont la qualité de l’eau du fleuve, l’accès public et les milieux naturels aux abords du fleuve, le développement économique, les activités liées à la sensibilisation, l’éducation et la promotion ainsi que les enjeux liés à la gouvernance[^16].
La TCR de Sud de l'estuaire moyen est la cinquième table de concertation. Il s’agit toutefois officiellement de la TCR6. Le comité Zip du Sud-de-l’Estuaire est responsable de sa coordination. Elle comprend le territoire situé entre Berthier-sur-Mer dans la région de Chaudière-Appalaches et Notre-Dame-des-Sept-Douleurs dans le Bas-Saint-Laurent. Les enjeux prioritaires établis par les membres sont l’accès au Saint-Laurent et aux marinas, la qualité de l’eau et la contamination, l’érosion et la submersion côtière et l’accessibilité des données sur les ressources et les écosystèmes[^17].
La dernière table de concertation régionale présentement en activité est celle des Îles-de-la-Madeleine (TCR12) dont les mandats sont coordonnés par le comité ZIP des Îles-de-la-Madeleine. Celle-ci couvre le territoire situé aux abords des Îles-de-la-Madeleine et de Grosse-Île. Les quatre enjeux structurants déterminés par les membres de la table sont liés aux changements climatiques, à la qualité de l’eau, aux volumes d’eau potable et au maintien des habitats et de la biodiversité[^18].
Le gouvernement du Québec prévoit l’instauration progressive de six tables de concertation régionales additionnelles. Le territoire couvert par ces TCR comprend les secteurs du Nord de l'estuaire moyen (zone 5), le Nord de l'estuaire maritime (zone 7), le Sud de l'estuaire maritime (zone 8), le Nord du golfe (zone 9), le Sud du golfe (zone 10) et la Baie-des-Chaleurs (zone 11)[^19].
[^1]: Ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1993 [^2]: Précédemment quatorze [^3]: Stratégies Saint-Laurent, 2011 [^4]: Ministre de l'environnement du Canada et Ministre de l'environnement et de la faune du Québec, 1998 [^5]: Ministre de l'environnement du Canada et Ministre de l'environnement du Québec, 2003 [^6]: Gouvernement du Québec, 2005 [^7]: Chamard, Drolet, Filion et Labrecque, 2011 [^8]: Table de concertation régionale Zone de Québec, 2017 [^9]: Ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs, 2012 [^10]: Ibid. [^11]: TCR Haut-Saint-Laurent – Grand Montréal, 2021 [^12]: Comité ZIP du lac Saint-Pierre, 2015 [^13]: Comité ZIP Les Deux Rives, 2021 [^14]: Table de Concertation Régionale de l'Estuaire Fluvial du Saint-Laurent, 2021 [^15]: Communauté Métropolitaine de Québec, 2018 [^16]: Table de concertation régionale Zone de Québec, 2017 [^17]: TRC Sud de l'Estuaire-Moyen, 2021 [^18]: TCR des Îles-de-la-Madeleine, 2019 [^19]: Gouvernement du Québec, 2021