01_Économie et activités - CUPUM/ecometropole_laurentienne GitHub Wiki
L’impact économique du fleuve pour les Européens est quantifiable dès les premières explorations avec la traite des fourrures, l’une des principales activités commerciales effectuées sur le territoire en plus de la pêche dont l’impact économique est moins substantiel au cours de ces premiers temps. Il servira plus tard au transport du bois et des marchandises, solidifiant ainsi son statut en tant que vecteur économique[^1]. Les ports de Montréal, Port-Cartier, Sept-Îles et Québec sont à l’heure actuelle les principaux points de transit de marchandise du Québec. Ils représentent les 2e, 3e, 4e et 5e rangs des ports les plus importants au Canada relativement au trafic portuaire[^2]. Le Port de Montréal se classe au second rang au Canada en termes de trafic de marchandises avec plus de 40 millions de tonnes métriques de fret manutentionnées[^3] et au 95e rang mondial en termes de rendement[^4].
On constate l’établissement des premières colonies le long des voies navigables, particulièrement dans la vallée du Saint-Laurent, caractérisée par la fertilité de ses terres. L’un des facteurs d’importance qui caractérisent la société de l’époque de Nouvelle-France est l’emprise qu’exerce l’église[^5]. On note dans cette optique le pouvoir décisionnel détenu par les paroisses, et ce, dès les premiers temps des colonies. La majorité de la population québécoise est encore à l’heure actuelle localisée le long des rives du Saint-Laurent, conséquence de ces premiers déploiements. Non seulement un axe de peuplement, nous nous devons de souligner son rôle en tant que voie de transport ainsi qu’en tant qu’atout majeur pour le développement touristique du Québec. Le fleuve Saint-Laurent a longtemps été la seule route de communication. Les historiens font état de l’absence d’un réel besoin en routes terrestres jusqu’au 18e siècle[^6]. Les compagnies de navigation ont plus tard été les principales institutions œuvrant dans le transport des passagers. Notons le rôle de Canadian Steamship Lines qui a cessé ses opérations en 1966[^7], reconnues surtout pour ses bateaux blancs qui offraient des services de croisières sur le Saint-Laurent.
L’histoire du Saint-Laurent est ponctuée d’interventions et de projets divers qui ont influencé son développement et celui des communautés avoisinantes, notamment la construction d’un premier phare sur l’île Verte en 1809 et celle du pont Victoria, inauguré en 1860[^8]. L’un des projets les plus importants consiste en l’aménagement du chenal maritime, entrepris par le gouvernement du Canada au cours de la seconde moitié du 19èeme siècle, et ce, à la demande du milieu des affaires. La visée principale de cette opération était d’approfondir certains chenaux d’accès par une excavation des sols selon un principe de dragage. Il s’agit dans ce cas précis de permettre une amélioration de la navigation, particulièrement pour ce qui est des gros navires qui éprouvaient des difficultés de navigation. Ces difficultés étaient causées par la faible profondeur du lac Saint-Pierre, situé aux abords de Montréal. Le secteur visé par cette opération s’étend de l’entrée du canal de Lachine jusqu’à la municipalité de Pointe-au-Père qui fait désormais partie de la ville de Rimouski[^9]. À cette vaste opération s’ajoute la mise en place de signaux et de phares visant à accroître la sécurité et permettre une réduction des taux d’assurance de transport de marchandises le long du fleuve. L’aménagement du chenal s’achève par l’inauguration, en 1959, de la voie maritime du Saint-Laurent.
Cette voie maritime résulte d’une entente entre les gouvernements américains et canadiens ainsi que les provinces de l’Ontario et du Québec. Signée en 1954, elle vise la canalisation du fleuve du Port de Montréal jusqu’au lac Érié. En plus des travaux de dragage et d’excavation, l’aménagement de barrage, le réaménagement de quatre ponts de la région de Montréal, les travaux comprennent l’aménagement de sept écluses, dont cinq en territoire canadien. Deux centrales hydroélectriques sont situées sur cette voie maritime soit, celles de Moses-Saunders et de Beauharnois[^10]. La polémique soulevée à l’époque était substantielle, résultant majoritairement d’une absence de consensus quant à l’orientation et l’application du projet. La voie maritime du Saint-Laurent a toutefois permis la multiplication des échanges commerciaux par mer et demeure une artère commerciale vitale à l’économie canadienne et québécoise.
On note au cours des dernières années des projets d’envergures faisant part d’une évaluation par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) du fait notamment de leurs répercussions environnementales. Il est question principalement du projet de construction de l’oléoduc Saint-Laurent entre Lévis et Montréal-Est et de l’exploitation du gaz de schiste dans le Shale d’Utica des basses-terres du Saint-Laurent. Cette première intervention, proposée par Ultramar en 2005, visait la construction d’une conduite de transport de produits pétroliers sur une distance d’environ 240 km. L’objectif était de permettre un transport éventuel de 100 000 barils par jour tout en réduisant les coûts ainsi que les gaz à effet de serre associés au transport. Au-delà des divers milieux boisés et agricoles affectés par le projet, les projections évaluaient à 243 cours d’eau mineurs et 9 cours d’eau majeurs franchis par l’oléoduc. Divers enjeux avaient été soulevés par les citoyens, notamment les répercussions sur les milieux biophysiques, la sécurité pour les populations avoisinantes et les contraintes aux activités agricoles. Au terme de l’analyse du BAPE, la commission s’était avérée favorable au projet, mais avait entre autres recommandé une participation financière de la part d’Ultramar visant à contribuer à des projets de compensation de milieux hydrique, et ce, en collaboration avec les groupes environnementaux et les organismes de bassins versants concernés par la présence de l’Oléoduc[^11].
Le mandat d’enquête sur le projet d’exploitation du gaz de schiste dans le Shale d’Utica est une intervention réalisée en 2014 s’insérant à l’intérieur de la « Stratégie énergétique 2006-2015 : L’énergie pour construire le Québec de demain ». Le mandat visait précisément à éclairer le gouvernement du Québec quant à sa réflexion sur cette filière énergétique spécifique. Il s’agissait de densifier les connaissances liées aux effets et aux techniques en lien à cette forme d’énergie. Le territoire spécifique visé par cette enquête était celui du Shale d’Utica, situé dans les basses-terres du Saint-Laurent. Au terme de l’enquête, il avait été déterminé qu’une exploitation du gaz de schiste serait susceptible de générer des impacts majeurs sur les communautés environnantes. La commission avait également déterminé que de telles activités pourraient entrainer des conséquences importantes sur l’environnement, en particulier sur la qualité des eaux, les aires protégées ainsi que sur les milieux humides[^12].
Nous pouvons faire état de diverses interventions ponctuelles additionnelles à l’intérieur du territoire couvert par le fleuve Saint-Laurent. La loi définit les projets susceptibles d’avoir des effets sur le fleuve et ses tributaires de la façon suivante. Il s’agit des projets de construction de barrages, de digues et de centrales hydroélectriques, les projets de dragage, creusage, remplissage, redressement et remblayage du fleuve. On retrouve, de plus, les projets de détournement ou de dérivation ainsi que l’agrandissement de ports et de quais[^13]. Mentionnons l’une des plus récentes initiatives de développement en rapport au Saint-Laurent soit, le projet Laurentia, un partenariat entre le Port de Québec, Hutchinson Ports le Canadien National. Ce projet de terminal intermodal pour porte-conteneurs en eau profonde est défini comme s’inscrivant dans une démarche intégrée de développement durable. Un projet de relance économique, celui-ci vise à dynamiser les activités portuaires sur le Saint-Laurent[^14]. Bien qu’encore actuellement en consultation préliminaire, le projet se distingue par la polémique engendrée. Notons, en plus d’une opposition de la part Agence d’évaluation d’impact du Canada (AEIC) en raison d’effets environnementaux négatifs importants, une opposition citoyenne significative[^15].
[^1]: Morissonneau, 1978 [^2]: Ministère de l'Économie et de l'Innovation, 2015 [^3]: Administration portuaire de Montréal, 2020 [^4]: Lloyd's List Intelligence, 2019, p. 24 [^5]: Lachance, 2004 [^6]: Eccles, 1969 [^7]: Franck, 2000 [^8]: Mercier et Hamel, 2005 [^9]: Franck, 2000 [^10]: Bowering et Pelton, 2017 [^11]: BAPE, 2007 [^12]: BAPE, 2014 [^13]: Giroux, 1991 [^14]: Laurentia terminal, 2020 [^15]: Néron, 2021; Zanetti, 2021